22/05/2024
Récits et témoignages

Nicolas Martin, la force tranquille du trail

Portrait d'un traileur de haut niveau français sur la longue distance, amoureux des montagnes.

Après dix ans de compétitions et une reconnaissance mondiale, le traileur Nicolas Martin, âgé de 38 ans, est contraint de ralentir le rythme en raison d’une pathologie au genou. C’est dans les Alpes, son refuge naturel, qu’il trouve un nouvel équilibre, entre récupération et contemplation.

Nicolas Martin est de ceux nés pour vivre en pleine nature. Il grandit à la campagne, dans un hameau de 50 habitants, niché dans les Alpes. Son enfance est bercée par les montagnes. Le plus clair de son temps dehors, entre le foot avec ses amis, la chasse avec son père et la pêche, c’est tout naturellement que sa pratique de la course de la pied se tourne vers le trail. À 24 ans, une passion mordante se transforme en sport de compétition. Le jeune traileur est animé par deux rêves : remporter le trail des Templiers et faire partie de l’équipe de France. Il ne le sait pas encore, mais quelques années plus tard, il les touchera du bout des doigts. 

 

La passion au-delà des compétitions

2010. Nicolas participe pour la première fois au Trail des Templiers, une course encore méconnue du grand public à l’époque. Il devient un grand habitué de cette compétition, avec neuf participations au total. En 2012, il se classe quatrième, un résultat qui le propulse en équipe de France de trail pour la première fois. "Je ne m’y attendais vraiment pas, c’était un moment rempli d’émotions," se souvient-il. Ses rêves deviennent réalité. Nicolas Martin franchit deux fois la ligne d’arrivée du Trail des Templiers en deuxième position. Il est sélectionné dix fois en équipe de France, culminant en 2022 avec un titre de vice-champion du monde de trail sur longue distance. "Je savais que c’était quelque chose qui n'arriverait probablement qu’une seule fois dans une vie". Entre 2014 et 2022, il devient l'un des meilleurs traileurs français sur la longue distance

Le secret de sa longévité ? Courir pour le plaisir. “J’étais toujours un enfant dans ma tête, même à 36 ans. J’étais trop investi dans le jeu pour chercher à optimiser les performances. Ce n’était jamais des sacrifices, toujours un plaisir.” En parallèle des compétitions, il continue ses entraînements entre 4 à 6 heures par jour, croisant différentes disciplines. “80% du temps d'entraînement c’est du pur plaisir. Tu ne te dis pas que c’est de l'entraînement parce que tu pars courir en montagne.” Nicolas Martin incarne une approche philosophique du trail, privilégiant la passion et le plaisir sur la performance pure. 


“Oui, la performance est intéressante, mais pas au détriment de la santé.”

La carrière de Nicolas prend un autre tournant lorsqu’il rencontre Patella bipartita, une pathologie diagnostiquée à son genou. Le constat est sans appel : il ne peut plus courir à la même intensité qu’auparavant. “J’ai fait la bêtise de ne pas écouter les murmures de mon corps. C’est arrivé à un point de non-retour.” Nicolas mène alors une vie plus paisible dans les Alpes, marquée par la récupération et la réflexion. Cette année est charnière pour savoir s’il doit, ou non, arrêter sa carrière de haut niveau. “J’avais dit que j’arrêterai les compétitions à 40 ans. Si j’arrive à courir avant, je continuerai deux années supplémentaires.” Nicolas espère pouvoir participer au Trail des Templiers au mois d’octobre. Il continuera de préparer un ou deux événements par an. ”J’aime le côté préparation, être très carré.” Plus que la destination, c’est le voyage qui lui importe. 

S’il ne peut plus courir, il ne se laissera pas pour autant abattre. “À 38 ans, j’ai accepté de ne plus faire de sport à haut niveau, tant que je peux continuer mon sport.” Depuis 2020, il accompagne différents athlètes à distance et envisage le métier de coordinateur sportif. Son objectif est de sensibiliser les sportifs à l’importance de la santé, souvent négligée au détriment de la performance.Si j’avais un conseil à donner au Nico d’il y a dix ans, je lui dirais de s’écouter davantage, d’être vigilant sur le sommeil et la nutrition et de ne pas se forcer à faire des courses quand l’état ne le permet pas.” Le trail est un sport exigeant physiquement. "Il faut être résilient, car c’est dur physiquement, et il y a des moments où tu te demandes ce que tu fais là," explique-t-il. L'intensité des compétitions et des entraînements est élevée, mais cela ne doit pas se faire au détriment de la santé. 

 

Une ode au trail et à la nature

Au fil des kilomètres, le trail offre à Nicolas du temps pour réfléchir et prendre du recul sur la vie. Cette introspection et ce lien profond avec la nature l’aident à maintenir un équilibre personnel et une vie simple. “Je ne vivrais pas différemment si je n’avais plus de contraintes matérielles.” Traileur et amoureux des montagnes, Nicolas est attaché à la préservation de la nature. “Les traileurs voient leur terrain de jeu dégradé par le réchauffement climatique.” Il regrette l'usage excessif des voyages en avion pour les compétitions, plaidant pour une modération nécessaire. Il est pour autant conscient de l'ambivalence de sa position, lorsqu'il a eu la chance de voyager, grâce au trail, comme sur les îles Canaries, avec la Transgrancanaria. “Je me souviens du lever de soleil sur l’île de Tenerife. On percevait le volcan Teide à l’horizon. Le terrain était volcanique. C’était magique.” Reconnaissant d’avoir couru outre-atlantique, il l’est davantage de vivre sur son terrain de jeu favori, les Alpes, toujours guidé par l’émerveillement et la joie que lui procure la nature. Voir une montagne, se demander ce qu’il y a derrière, là où il faut une journée pour un randonneur pour faire un sommet, un traileur peut le faire en deux heures, et faire un sommet, deux sommets, trois sommets. C’est ça qui est excitant.”

À travers Xperience Sport, il transmet son héritage du trail aux plus jeunes. “J’aime pouvoir échanger avec des personnes que tu ne rencontrerais pas forcément dans ton cercle de proches, et donner l’opportunité à des jeunes de rencontrer des athlètes de haut niveau.” Il y voit aussi l’opportunité de démocratiser le sport, souvent négligé au profit d’une vie plus sédentaire. Mais ce que l’on retiendra également de ses conférences, c’est l’importance de la résilience et du plaisir dans tout ce que l’on entreprend, en tant qu’entreprises ou particuliers.

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